Hugues Aufray
FLEUR D'ORANGER



Elle avait à peine quinze ans, elle jouait encore à la poupée
Elle avait de grands yeux d'enfant, je l'appelais fleur d'oranger

Quand nous sommes venus au pays, c'était la saison des lilas
Je ne savais rien de la vie bien que je sois déjà soldat

Dans ces montagnes isolées, des dissidents y'en a partout
C'est pas facile de les trouver, l'armée n'en vient jamais à bout

Au cours des tout derniers combats, nous fûmes pris entre deux feux
Et nous perdîmes pas mal de gars au fond d'un ravin rocailleux

Trois soldats de ma compagnie, un soir sont sortis des camions
C'était un peu avant minuit sous le ciel chantait les grillons

Le ciel sentait bon le jasmin, dans la nuit brillait un croissant
Il avait le blanc de tes seins, un vent chaud soufflait du levant

Ils ont surgi soudain tous trois par la porte de sa maison
L'un d'eux lui attacha les bras, un autre arracha son jupon

On l'a trouvée dans son lit bleu, pâle et vidée de tout son sang
Les larmes collaient ses cheveux, le soleil baignait le couchant

On a vite étouffé l'affaire, personne n'a rien su à Paris
Ce ne fut même pas un fait divers, qu'un incident en Algérie


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