Georges Chelon
AVANT (LE GRAND DADAIS)



Avant, j'étais tout seul en cause,
Et n'avais pour souci
Qu'à m'occuper de moi,
Avant, ce n'était pas grand-chose
Si, le temps d'un midi
Mon corps ne mangeait pas.
Avant qu'est-ce que ça pouvait faire
Si, au lieu de me taire,
De les garder pour moi,
J'allais dire mes quatre colères
Pour défendre un envers
Qui méritait l'endroit.

Avant, quand j'en avais le temps
Quand venait le printemps,
Quand j'en avais envie,
J'allais essouffler mes vingt ans
Sur des corps qui souvent,
Ne sortaient que la nuit,
D'avant que te dirais-je encore,
Sinon que j'avais tort
De croire que je vivais.
D'avant il me reste la vue
D'un couloir sans issue,
D'une porte fermée

Mais il vrai qu'avant
Je ne t'avais pas,
Mais il est vrai qu'avant,
Je ne nous aimais pas,
Mais il est vrai qu'avant,
Quand mes draps étaient froids,
Je n'avais pas ton corps pour moi,
Je n'avais pas tes bras.

Tu vois, je n'étais rien,
Ou presque rien,
Mais j'attendais, guettant,
Comme on guette le jour
Sans savoir bien toujours
Où il va se lever.

Avant, mais ne parlons plus d'avant
Parlons de maintenant,
Ou mieux ne parlons pas.
Des mots, ce ne sont que des mots,
Et mes doigts sur ta peau
Te savent mieux que moi.
Mes yeux te dévorent des yeux,
Mes yeux te gravent en eux
Pour qu'ils ne t'oublient pas.
Amour, te voilà mon amour,
Pour des nuits et des jours
Qui n'en finiront pas.

Car il est vrai qu'avant
Je ne t'avais pas,
Car il est vrai qu'avant
Je ne nous aimais pas,
Car il est vrai qu'avant,
Quand mes draps étaient froids,
Je n'avais pas ton corps pour moi,
Je n'avais pas tes bras.

Tu vois, je n'étais rien,
Ou presque rien
Mais j'attendais, guettant,
Comme on guette le jour
Sans savoir bien toujours
Où il va se lever.

Tu vois, je n'étais rien
Ou presque rien,
Mais j'attendais.
Tu vois que les années passées,
Quand le jour s'est levé,
M'ont mis de ton côté.


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