Georges Chelon
PAUVRE MONDE



Voici que le poing prêt à fondre
Sent ses doigts qui se fondent
En espoir de caresses,
Voici que le chien prêt à mordre
Sent ses crocs qui se tordent
Sur la main et la lèchent,
Voici que la biche fragile
Peut s'en aller tranquille
Boire à la source pure,
Voici que ne sont que murmures,
Que souvenirs lointains,
Les aboiements des chiens.

Voici que la main qui se tend,
Bien avant de sécher,
Sent qu'une autre la serre
Voici que le geste se rend
Et que la main serrée
A son tour va le faire,
Voici que les portes s'entrouvrent,
Que les tables se couvrent
D'un couvert en attente,
Voici que les verrous se cassent
Et que l'oeil se lasse
De guetter par les fentes.

Voilà que les doigts se referment,
Que les crocs se font fermes,
Et voilà qu'ils se battent,
Voilà que la biche se traîne,
La source devient terne
Sous la meute qui chasse
Voilà que la main se fait lâche,
Que l'autre s'en détache,
Et voilà qu'elles s'enterrent,
Voilà que les portes se ferment,
Les tables se desservent,
Et tout est à refaire.

Pauvre monde, pauvre monde
Tiens tu fais peine à voir
Pauvre monde, pauvre monde
C'est vraiment sans espoir.


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