Lucienne Delyle
SANS PRESQUE Y PENSER



Écoute mon amant
L'air que ce mendiant
Chante dans les rues,
C'est sur cet air, vois-tu,
Que tu m'es apparu.
C'était au bal musette,
Mon allure honnête
T'avait plu, je crois
Tu t'es avancé vers moi...

Tu m'as dit: "Voulez-vous danser?"
J'ai dit oui presque sans y penser
J'ai senti contre moi ton bras ample et fort,
Et j'ai tourné longtemps tout contre ton corps,
La musique a soudain cessé
Tu m'as dit: "On va recommencer"
Et pour rester encore contre toi, bercée,
J'ai dit oui, sans presque y penser.

Ce fut ta chambre sombre
Nous étions deux ombres
Dans la nuit immense,
J'étais là sans défense,
En toi j'avais confiance.
Je vis au fond du coeur
Que l'amour vainqueur
Nous dictait sa loi,
Tu t'es avancé vers moi...

Tu m'as dit...
Là tu n'as rien dit.
Je n'ai donc même pas eu à dire oui.
Comme fiançailles, dans le fond
Ce fut un peu court,
Mais quoi, l'Amour,
Le vrai, commence par l'Amour!

Et depuis ce soir-là ma vie
Est un bal qui n'est jamais fini,
Et je tremble en pensant qu'il a commencé
Par un oui sans presque y penser.


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