Marie-Michèle Desrosiers
CERF-VOLANT

M.M. Desrosiers


Ça fait des siècles que je roule
Dans un immense autobus gris
À l'abri de la pluie, enfermée dans ma vie
Autour de moi tout est rangé, l'univers s'est figé
Plus rien ne vient parfumer mes nuits climatisées

Les dimanches de ma jeunesse
Papa fumait son gros cigare
En nous promenant dans son gros char
Le front collé aux vitres fermées
Moi je me voyais pour passer le temps
Debout dans une décapotable
Aussi droite que les arbres
Avec le dos tourné au vent
Les bras en V comme un cerf-volant

Besoin de feu et d'ouragans
J'ai besoin d'air et de lumière
Et de nuits bleues de mille et un ans
Et de matins blancs comme les pommiers au printemps

Un soir de mai, sur le pont d'un bateau
J'ai vu une baleine à fleur d'eau
Souffler d'un jet jusqu'aux oiseaux
Elle dessinait de grands sillons
De longs remous vers l'horizon
J'aurais voulu me jeter à l'eau
Prendre le large a côté d'elle
Ou m'envoler battant des ailes
Les bras en V comme un cerf-volant
Mon autobus arrive enfin
Je savais que tu m'attendais
Tu me souris mais je sais déjà
Que je ne pourrai pas te conter ce que j'ai rêver
Rêvé toute éveillée


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