LES CANONS
Paroles: Henri Nadot, 1871


Les canons du Sud ou du Nord,
De l'est ou de l'ouest assourdissent
Ces noirs travailleurs de la mort
Contre la liberté s'unissent
Chefs d'oeuvre de l'art qui détruit
Chers aux despotes qui commandent

Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende!

Celui qui vous poine et celui
Qui vous sert de cible à distance
Sont deux peuples fiers aujourd'hui
D'être ennemi quelle démence
L'arme au pied, le soldat se dit:
Mais la guerre, qui la demande?

Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende!

La guerre est la destruction
Des princes qu'on subit encore
Chacun se dit je suis lion
Son peuple est l'agneau qu'il dévore
L'esclave chaque jour s'instruit
C'est ce que le maître appréhende

Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende!

On vous doit de dignes exploits
Par vous la bastille est rasée
Et plus tard la ligue des rois
Vers la frontière est repoussée
Mais un César hélas surgit
Des courtisans revient la bande

Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende!

La fumée empêche de voir
Où va tomber l'engin qui tue
Vous obéissez au pouvoir
Qu'il soit au trône ou dans la rue
Le droit au silence est réduit
L'idée en est elle moins grande?

Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende!
Vous êtes l'instrument brutal
Imitant la voix du tonnerre;
Instrument comme lui fatal,
Tendant à dépeupler la terre.
Qu'on vous encloue, et que la nuit
Sur tous vos désastres s'étende...

Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende!

Qu'on vous fonde et vous change enfin,
En une pyramide immense
Qu'on y lise sous le burin,
Universelle indépendance
Vers la paix le monde est conduit
Bien qu'encore au sceptre on prétende

Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende!


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