Jacques Higelin
IL N'Y A PAS DE NOM



Il n'y a pas de nom sur cette croix rouillée
Plantée dans le fourreau du ventre de la terre,
Au fond d'un cimetière abandonné.

Qui est né, qui est mort, qui dort sous cette croix?
Quel sort l'a condamné, sans regret ni remord,
Au secret de l'anonymat?

Depuis combien d'années personne n'est venu
Rendre un dernier salut, fleurir d'une pensée
Celui ou celle qui n'est plus?

Dans le désert de la solitude d'où jamais personne ne revient
Réclamer à l'ingratitude la maigre part du respect qu'on lui doit,
Rien qu'une prière pour le repos de son âme.

La vie, l'amour, la mort sont filles du néant
Que le vent de l'histoire balaie d'un courant d'air
Dans les couloirs de l'infini.

Dans le désert de la solitude d'où jamais nul ne revient
Témoigner de l'ingratitude qui l'a abandonné au seuil du tombeau
Sans une prière pour le repos de son âme.


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