Gilbert Laffaille
CHOCOLAT ET CERISES



Un petit lézard dort,
Caché entre deux pierres.
"Tiens", se dit petit Pierre,
"Qu'est-ce que c'est que la mort?"
Il ramasse un caillou,
Il écrase la tête.
Un lézard, c'est tout mou.
Finalement, ça l'embête.
Il dépose l'animal
Dans une boîte en carton,
Le couvre de coton
Et joue à l'hôpital.

Le vent chaud de l'été
Souffle sur sa chemise.
Il pense à son goûter,
Chocolat et cerises,
Biscottes ou petit-beurre.
Il oublie l'animal,
"Plus tard, je serai docteur
Ou alors général".
Sur l'avion mécanique
Donné par sa grand-mère,
Il fait jouer à la guerre
Ses soldats en plastique.

Une belle auto verte
Tout en haut de la côte.
"Tiens, on dirait la nôtre"
La portière est ouverte.
Petit Pierre, innocent,
Desserre le frein à main
Et va sur le chemin
Voir l'auto qui descend.
L'auto va s'écraser
Contre un mur en ciment.
"Tiens, je vais arroser
Les fleurs de ma maman"

Le vent chaud de l'été
Souffle sur sa chemise.
Il pense à son goûter,
Chocolat et cerises,
Biscottes ou petit-beurre.
Il oublie la voiture.
Tout à coup, sur le mur,
Une ombre lui fait peur.
Dans son vieux mouchoir sale,
Il cache ses trésors:
Un canif, un ressort,
Un lacet de sandale.

Petit-Pierre imagine:
"Aujourd'hui, c'est ma fête"
Il va dans la cuisine
Où sont les allumettes.
Il prépare un gâteau,
Du pain et des fourmis.
"Tiens, pour qu'il soit plus beau,
J'allume des bougies"
Le feu monte aux rideaux.
Petit-Pierre bat des mains
Mais ça l'ennuie bientôt.
Il retourne au jardin.

Le vent chaud de l'été
Souffle sur sa chemise.
Il pense à son goûter,
Chocolat et cerises,
Biscottes ou petit-beurre.
Il oublie l'incendie.
C'est un beau mercredi.
Il est bientôt quatre heures...


À la page des textes de Gilbert Laffaille
À la page des textes