INDIANAPOLIS


LE CLERGYMAN:
Je ne l'ai pas poussé à devenir acteur
J'ai simplement tenu mon rôle de pasteur
Mais je crois avoir eu une certaine influence
Sur sa vie au moment de son adolescence
Je l'emmenais le dimanche avec d'autres garçons
Aux courses automobiles à Indianapolis
Capitale d'un État dont c'était la passion
Mais pour Jimmy ce fut une religion, un vice
J'ai souvent regretté plus tard dans mes prières
De l'avoir fait flasher pour les voitures de sport...
Pour surmonter l'idée du départ de sa mère
II fallait qu'il apprenne à affronter la mort
En ce temps-là j'étais aussi très amateur
De courses de taureaux, ce qui pour un pasteur
Peut vous sembler bizarre, surtout en Indiana
Mais j'allais quelquefois l'hiver à Tijuana
Filmer des corridas, mexicaines il est vrai
Que je lui projetais le soir au presbytère
Et je lui faisais lire des romans d'Hemingway
Pour lui faire partager mon plaisir solitaire
Blessé de guerre, j'aimais jouer à risquer ma peau
Je faisais le taureau et lui le torero
Je me couchais par terre quand il faisait le beau
Chacun sa libido et chacun son credo
Ses grands-parents étaient des fermiers du Midwest
Qui l'adorèrent bien sûr, et lui donnèrent "the best"
A dix ans un cheval, à seize ans une moto
Alors ce fut pour lui le plus beau des cadeaux
C'était une Triumph, si ma mémoire est bonne
Comme celle que conduisait Brando dans "The Wild One"
Un film qu'il n'avait vu qu'une seule fois au drive-in
Mais qui l'avait marqué bien plus qu'on l'imagine
En ce temps-là les filles ne l'intéressaient pas
Mais j'en ai connu une qui était folle de lui
Et quand il est parti, on peut dire qu'il laissa
Un vide dans sa vie, un vide dans ma vie..


À la page des textes de "La légende de Jimmy"
À la page des textes