Claude Nougaro
ALLÉE DES BROUILLARDS


Quand les hommes deviennent sages
Polis, polis trop polis
Et que tu vois plus ton visage
Dans le miroir dépoli
De leurs yeux qui te traversent
Comme si t'étais pas devant
Ô femme, c'est que ta jeunesse
S'est envolée dans le vent
Le vent qui claque les portes
Le vent qui sait le vieil art
De larguer les feuilles mortes
Allée des Brouillards, allée des Brouillards

Tu peux prendre des bains de mousse
Croquer des biscottes sans sel
Sur ta peau des lunes rousses
Ont viré tes lunes de miel
C'est fini, y a plus personne
Pour les caresses déplacées
Tu peux repasser ton automne
À la vapeur du passé
Les bras tendus comme des tiges
Aux yeux des câlin-maillard
Tu seras seule jusqu'au vertige
Allée des Brouillards, allée des Brouillards

Mais de quel droit je t'inflige
Ce tableau désespéré
Tu pourrais être ma fille
Tu n'en as rien à cirer
L'hiver tu le fais craquer
Et lorsque tu seras vieille,
Vers minuit, minuit un quart
Je te le dis au creux de l'oreille
Il te reste un petit rencart
Si t'as pas le coeur trouillard
Mon fantôme est un gaillard
Allée des Brouillards
Allée des Brouillards
Des Brouillards...


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