Berthe Sylva
VIENS, MAMAN
Paroles: Pothier, musique: Leojac, Maisondieu, 1931


C'était une fille une fleur du faubourg
Qui comme d'autres s'était mise à boire
Pour oublier quelque chagrin d'amour
C'est des gueux l'éternelle histoire
Courant les rues son petit gosse un bâtard
Chaque soir la retrouvant grise
Au bar du coin titubant l'oeil hagard
Tout échevelée et clamant des bêtises
Sans comprendre alors le gamin
Lui disait en pressant la main

Viens, maman
Ils te regardent
Ils t'appellent la pocharde
Pourquoi donc
Ces hommes-là
Derrière toi rient comme ça
Moi je veux pas, ma petite mère
Qu'on te fasse des misères
Je suis pas fort je suis pas grand
Mais tu vois je te défends
Viens, maman
Viens, maman

C'était l'hiver il sortait de l'atelier
Près d'un bar il vit une foule
Se bousculer et semblant s'égayer
Il entend parbleu elle est saoule
C'était sa mère affalée dans le ruisseau
Le gosse alors bravant tous les rires
Les mots railleurs et grossiers des badauds
Puis à genoux tendrement se mit à dire
Ces gens-là auraient plus de pitié
S'ils savaient ton triste passé

Viens maman
Ils te regardent
Ils t'appellent la pocharde
Mais toi donc
Tu ne dis rien
Ton regard semble éteint
Comme c'est lâche cette foule
Qui piétine une femme saoule
Quand la boue et le sang
Souille ses cheveux blancs
Pauvre maman
Pauvre maman


À la page des textes de Berthe Sylva
À la page des textes