Philippe Clay
LE NOYÉ ASSASSINÉ Paroles: Charles Aznavour, musique: Florence Véran, 1952
Tout seul au fond de la Seine
Je commence à m'ennuyer
En vain je me démène
Pour pouvoir me libérer
Dix ans dans la même pose
Je vous assure que c'est long
Depuis que je me décompose
Je fais peur aux poissons
Qui fichent le camp sans rémission
Je suis un noyé assassiné
Par un gars qu'un voulais
A mon porte-monnaie
Je n'avais pas un centime
Lui pour cacher son crime
Il me jeta dans l'abîme
Et depuis je m'abîme
Dans cette masse d'eau
Je suis un noyé assassiné
J'ai au cou un boulet
M'empêchant de remonter
Parlez d'une aventure
Voilà dix ans que ça dure
Avec ça je vous jure
Que pour une cure, c'est une cure
Moi qui ai horreur de l'eau
Encore si on m'avait flanqué
Dans un tonneau
Où au lieu d'eau
Il y avait du vin clairet
Mais non, mes chairs en deviennent molles
Je me désole et je m'étiole
La Seine ne charrie pas d'alcool
Vous qui m'oyez, plaignez plaignez
Tous les noyés assassinés
Je vivais dans ma famille
J'étais un bon garçon
Je courais après les filles
Pour trousser leurs jupons
Hélas! dans ma retraite
Y'a rien de folichon
Pas une mignonnette
Rien que des petits poissons
Qui fichent le camp sans rémission
Je suis un noyé assassiné
Par un gars qu'en voulait
A mon porte-monnaie
Poussé par cette crapule
Voilà que je bascule
Dans l'eau qui fait des bulles
Et me voilà ridicule
Avec mon aire crevé
Je suis un noyé assassiné
J'ai au cou un boulet
M'empêchant de remonter
Vous parlez d'une histoire
Dans cette immense baignoire
Je n'ai que des déboires
Moi qui mangeais sans boire
Maintenant je bois sans manger
Parfois d'inutiles hameçons
Croyant pêcher
Viennent se loger
Dans le fond de mon pantalon
Ou bien une herbe un peut trop fine
Familièrement, grossièrement
Vient se loger dans mes narines
Vous qui m'oyez, plaignez, plaignez
Tous les noyés assassinés
Je suis un noyé assassiné
Qui voudrait insérer
Dans les annonces couplées
Cette petite chose
En vers plutôt qu'en prose
Je commencerai la chose
Simplement par, pour cause
Pour cause de départ
Je suis un noyé assassiné
Qui céderait volontiers
A un désespéré
Sans une seconde d'attente
De reprise exorbitante
Une retraite charmante
Où il y a l'eau courante
Dans un monde bien à part
Un coin qui vous fera plaisir
Très retiré
Où vous serez
Vraiment heureux à en mourir
Et moi ainsi de mon côté
Je pourrai dire
Au lieu de mourir
Heureux à en ressusciter
Si vous m'enviez
Venez me remplacer
Dans le domaine des noyés
Venez.