LE BÉRET


Chaque pays possède sa coiffure:
Le marocain porte un fez rigolo,
Le mexicain ne manque pas d'allure
En arborant son vaste sombrero!
Le bon bourgeois, ce n'est pas un reproche,
Porte un melon, tant mieux si ça lui plaît,
Moi, mon chapeau, je le mets dans ma poche,
Je suis gascon et porte le béret.

Notre béret c'est toute la Gascogne,
Et "per canta nouste beth ceü de Paü"
Nos montagnards aux jambes de cigogne,
Avec orgueil le portent en haut "ataü"
Et avec ça c'est tellement pratique,
Quand me sieur le curé sur la roue apparaît
Où le paysan dépose-t-il sa chique?
Mais "Diu Biban" mais c'est dans son béret.

Le béarnais aime le mettre en pointe,
Le basque, lui, le met sur l'occiput,
Et le landais, sans reproche et sans crainte,
Le pose ainsi quand il veut dire "zut",
C'est tout petit mais c'est une merveille:
Pour réfléchir c'est ainsi qu'on le met,
Et pour crâner on le met sur l'oreille
Quel orateur ce coquin de béret!

Quand grand-papa travaille dans la vigne,
Et qu'à l'église on sonne tant et plus,
Pour la prière, il l'enlève et se signe,
Plus de béret quand sonne l'angélus.
Les parisiens dont l'enfant n'est pas sage,
Pour le fesser prennent un martinet,
Un martinet! C'est un truc de sauvage,
Nous on lui flanque un bon coup de béret.

Lorsque à Bayonne, on joue à la pelote,
C'est son béret que l'on jette au vainqueur,
Et ce béret c'est pas de la gnognote
Puisque dedans on a mis tout son coeur!
Et le dimanche, il fait bon qu'on le sache
A la plaza ça fait beaucoup d'effet,
Nos jeunes gens vont exciter la vache,
Pour la sauter pieds-joints dans le béret,

Votre béret a fait le tour du monde,
Tous les champions qui battent un record
L'ont adopté sur la terre et sur l'onde,
Car un béret ça tient, coquin de sort,
Malgré le vent et malgré le cyclone,
Il est solide et peut-être, qui sait?
Alphonse XIII aurait gardé son trône
S'il avait eu pour couronne un béret.

Quand le conscrit quitte sa fiancée
C'est le béret qui rythme les adieux,
Quand il est loin, seul avec sa pensée,
C'est au béret qu'il parle avec les yeux.
Je ne veux pas vous parler de la guerre,
Quelques grincheux me le reprocheraient
Mais vous savez tout ce qu'ils ont pu faire
Les petits gars qui portaient le béret.


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