Jean Ferrat
COMPLAINTE DE PABLO NERUDA
Poème d'Aragon
Je vais dire la légende
De celui qui s'est enfui
Et fait les oiseaux des Andes
Se taire au coeur de la nuit
Le ciel était de velours
Incompréhensiblement
Le soir tombe et les beaux jours
Meurent on ne sait comment
Comment croire comment croire
Au pas pesant des soldats
Quand j'entends la chanson noire
De Don Pablo Neruda
Lorsque la musique est belle
Tous les hommes sont égaux
Et l'injustice rebelle
Paris ou Santiago
Nous parlons même langage
Et le même chant nous lie
Une cage est une cage
En France comme au Chili
Comment croire comment croire
Au pas pesant des soldats
Quand j'entends la chanson noire
De Don Pablo Neruda
Sous le fouet de la famine
Terre terre des volcans
Le gendarme te domine
Mon vieux pays araucan
Pays double où peuvent vivre
Des lièvres et des pumas
Triste et beau comme le cuivre
Au désert d'Atacama
Comment croire comment croire
Au pas pesant des soldats
Quand j'entends la chanson noire
De Don Pablo Neruda
Avec tes forêts de hêtres
Tes myrtes méridionaux
Ô mon pays de salpêtre
D'arsenic et de guano
Mon pays contradictoire
Jamais libre ni conquis
Verras-tu sur ton histoire
Planer l'aigle des Yankees
Comment croire comment croire
Au pas pesant des soldats
Quand j'entends la chanson noire
De Don Pablo Neruda
Absent et présent ensemble
Invisible mais trahi
Neruda que tu ressembles
À ton malheureux pays
Ta résidence est la terre
Et le ciel en même temps
Silencieux solitaire
Et dans la foule chantant
Comment croire comment croire
Au pas pesant des soldats
Quand j'entends la chanson noire
De Don Pablo Neruda
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