Léo Ferré
L'ÉTÉ S'EN FOUT
De cette rose d'églantine
Qui pleure sous la main câline
Et qui rosit d'un peu de sang
Le blé complice de Saint-Jean
De ces yeux qui cherchent fortune
Dans le ciel con comme la lune
De ces poitrines vent debout
De Saint-Tropez à qui sait où
L'été s'en fout
De ces cheveux qui font misaine
A la voiture américaine
De ce soleil qui tant et tant
Vous met du crêpe dans le sang
De cette sève de cactus
Qui coule au pied du Mont de Vénus
De ces nuits qui n'ont pas de bout
Et qui vous pénètrent jusque au bout
L'été s'en fout
De ce chagrin de chlorophylle
Qui se prépare loin des villes
De ce septembre paresseux
Qui se remue au coin des cieux
De cet automne adolescent
Comme une fille de quinze ans
Se défeuillant jusque au bout
Pour faire une litière au loup
L'été s'en fout
De ce galbe de la vallée
De ce mouvement des marées
De cette ligne d'horizon
Où ne rime plus la raison
De ces planètes bienheureuses
Où jase un jazz de nébuleuses
De cet ange ou de cet gouape
Enfin qui de sapin nous sape
L'été s'en tape
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