Renaud
TROIS MATELOTS
Paroles: Renaud Séchan, musique: Renaud Séchan, Franck Langolff


Nous étions trois jeunes matelots,
Trois beaux marins grands et costauds
Embarqués un jour à Toulon
Sans uniforme et sans gallon
Sur le porte-avions Clemenceau
Nous étions trois jeunes militaires,
Pas trop amoureux de la guerre
Et nous voulions bien nous faire tondre
En échange d'un tour du monde
Sur un joli bateau en fer

Le premier de ces matelots
Était breton jusqu'au mégot
Mais il était con comme un manche,
Comme un déjeuner du dimanche,
Comme un article du Figaro
Il avait grandi au bord de l'eau
Et n'en avait jamais bu trop
A quinze ans pour une donzelle,
Il a déserté La Rochelle
Pour les remparts de St Malo
Rue de la soif on le vit beau
A écumer tous les tripots
Mais lorsque s'en venait l'aurore,
Rouler de bâbord à tribord
Et s'échouer dans le ruisseau
Voulu partir sur un bateau
Goûter un peu du Sirocco
En pensant avec raison
Que l'océan rendait moins con
Et que pour lui y avait du boulot

Dieu qu'elle est belle l'histoire des trois matelots
Presque aussi belle que le pont du Clemenceau

Le deuxième de ces matelots
Était corse dans toute sa peau
Il était méchant comme la tourmente,
Vicieux comme une déferlante
Comme un article de Jean Co
Il avait grandi au bord de l'eau,
Mais n'en buvait que dans le Pernod
A quinze ans par un légionnaire,
S'est fait tailler une boutonnière
Près de la citadelle d'Ajaccio
Est devenu un vrai salaud,
S'est fait tatouer les biscotos
Entre le prénom de sa mère,
Des loups, des serpents, des panthères
Et le Christ au milieu du dos
Voulu partir sur un bateau
Pour ne jamais vivre comme un veau
Et pour faire voyager sa haine
De cette putain de race humaine
Peuplée de rasés, de blaireaux

Dieu qu'elle est longue l'histoire des trois matelots
Presque aussi longue que le pont du Clemenceau

Le dernier de ces matelots
C'était moi j'étais parigot
J'étais bon comme la romaine,
Rusé, malin comme une hyène
Musclé comme un flan aux pruneaux
J'avais grandi très loin de l'eau,
J'en buvais autant qu'un moineau
A quinze ans j'ai quitté Paname
Pour chasser de mon coeur une femme
Qui voulait y faire son berceau
J'ai bourlingué comme un claudo
J'ai rencontré des écolos
Qui m'ont dit: "Va voir les baleines
Qui vivent dans les eaux lointaines
Tu verras que ce monde est beau"
Voulu partir sur un bateau
Pour voir la Terre d'un peu plus haut
Doubler le Cap Horn dans les deux sens
Et voyager de Recouvrance
Jusqu'aux bordels de Macao

Dieu qu'elle est dure l'histoire des trois matelots
Presque aussi dure que le pont du Clemenceau

Le premier de ces matelots
Qui était con comme un drapeau
Il a fini plein de gallons,
Plein de sardines sur son veston
Et plein de merde sous son calot

Le deuxième de ces matelots
Qui était méchant comme un corbeau
Il a fini dans une vitrine
Au Ministère de la Marine
Petit chef derrière un bureau

Le dernier de ces matelots
S'est fait virer de son bateau
Pour avoir offert son pompon
A une trop jolie Ninon
Contre un baiser sucré et chaud

Si votre enfant est un salaud,
Un vrai connard, une tête pleine d'eau
Faites en donc un militaire
Alors il fera carrière
Sur un navire, dans un bureau

Mais s'il est bon, mais s'il est beau,
Même s'il est un peu alcool
Qu'il fasse son tour de la Terre
Tout seul sur un bateau en fer
Mais pas sue le pont du Clemenceau

Simple soldat, brave matelot,
Surtout ne m'en veuillez pas trop
Cette chanson je ne l'ai chantée
Que pour les planqués, les gradés
Les abonnés du Figaro


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