Brave marin ne revient plus de guerre.
Malbrough est bien parti.
Ces beaux soldats que nous aimions naguère,
Quand nous reviendront-ils?
Nos rêves, nos rêves les ont imités,
Et quoique l'on ait bâti bien des tours,
Nous avons vu passer tant de Trinités
Que n'attendons plus de retour.
Joli tambour, qu'as-tu fait de ta rose?
Les rues sont pleines de filles de roi.
On leur enseigne à ne parler qu'en prose.
Joli tambour, tu vas mourir de froid!
Vous passez un peu trop tard,
Compagnons de la Marjolaine.
Madeleine a les mains pleines
De bijoux d'un triste soir.
La tour, prends garde à ne plus te défendre.
Tu n'y perds pas beaucoup.
Dans mon jardin vous pouvez bien descendre:
N'y a plus de coucou.
Nos filles, nos filles en ont tant pleuré
Qu'elles se sont lassées d'agiter leur mouchoir.
N'ayant même plus à planter de laurier
Ont mis un masque à leur espoir.
Joli tambour, ne t'en viens plus nous dire:
"Dans mon pays il y en a de vraies".
Si tu gréais ton troisième navire,
Joli tambour, nul ne te suivrait.
On nous a dit de frapper,
Qu'il restait des coeurs de reine.
Compagnons de la marjolaine,
Ceux qui l'ont dit se sont trompés.
La pluie qui tombe a noyé la bergère,
Noyé le romarin,
Noyé les mâts de la barque légère
Avec tous ses marins.
O frère Jacques, au lieu de sonner matines,
Il vaudrait bien mieux que tu sonnes le glas.
O page, mon beau page à la triste mine,
De pleurer mon coeur est bien las.
Joli tambour, si tu cherches ta belle,
Elle n'est plus aux marches du palais.
Quand tu aurais des roses en ribambelles,
Ce n'est pas cette fleur-là qu'elle voulait.
Pour les chevaliers du guet
Chercherons au bord des fontaines,
Chercherons un coeur de peine
Qui n'ait jamais navigué.